Bonjour Darius Kehtari ! Est-ce que tu peux présenter ce qui t’a amené à devenir comédien ?

 

Alors, ce qui m’a amené au théâtre, c’est le cinéma. Et ce qui m’a amené au cinéma, c’est Louis de Funès. Quand j’avais 9-10 ans, sous la révolution en Iran, il n’y avait plus rien ; il n’y avait plus de théâtre, plus de film, plus rien. Nous étions trois familles réunies et nos parents avaient trouvé au marché noir deux films occidentaux : « La Grande Vadrouille » et puis un autre dont je ne me souviens plus. C’étaient les seuls films que nous avions pendant 2 ans et nous les regardions sans cesse! Nous les avions appris par cœur et nous jouions le film en entier. Nous nous échangions les rôles et j’adorais jouer le rôle de Louis de Funès dans « La Grande Vadrouille ». J’ai toujours adoré cet acteur que je continue à découvrir aujourd’hui. D’ailleurs, étant un immense fan de ses films, j’ai eu l’immense bonheur et chance de jouer à Paris avec Claude Gensac. Elle avait de magnifiques grands yeux bleus amoureux, qu’elle avait face à de Funès. Du coup, c’était un lien avec de Funès et une très belle rencontre! Et puis voilà, je suis arrivé en Suisse pour faire un conservatoire de Théâtre. J’ai un parcours assez classique. J’ai commencé par faire des pièces dans le subventionné, des pièces contemporaines et pas forcément de la comédie. J’ai pu jouer 2 pièces au TVQ, ancien TMR, et puis je suis monté à Paris. C’est là que j’ai commencé la comédie. Et je me suis trouvé dans ce genre-là. J’en aime la précision et le rythme. Ça me correspond vachement. J’aime particulièrement les comédies qui ont un vrai fond. C’est d’ailleurs le cas avec « Bienvenue au Paradis », on parle de la mort et de ce qui se passe après. Toute la plaidoirie du Procureur est vraiment magnifique parce qu’elle aborde des points essentiels dans une vie avec un regard angélique. Je trouve ça très beau. Dans la comédie, pouvoir transmettre quelque chose aux spectateurs qui soit différent de « mon cul sur la commode » ou simplement « je me suis fait tromper par ma femme » et que cela soit drôle et émouvant, c’est génial! Ça fait 2-3 pièces que j’ai jouées ici et j’ai à chaque fois pu trouver des moments d’émotions. Cet équilibre entre les deux nourrit d’ailleurs les moments de comédies comme les moments plus émouvants.

 

Est-ce que tu peux nous parler de ton personnage, Bertrand, dans « Bienvenue au Paradis »?

 

 

Bertrand est le Procureur lors du procès d’Anatole Pichon (joué par Daniel Vouillamoz). C’est un ange comme un autre qui a eu ses vies terrestres et qui n’a plus besoin forcément de se réincarner, car il a bouclé ses karmas, il a accompli son chemin de vie. Bien sûr c’est une comédie, alors il se trouve que l’avocate du procès est son ex-femme (son ancienne vie terrestre) et il semblerait qu’il y aient des choses à régler malgré tout… Et c’est là que l’auteur, Bernard Werber, amène de la comédie au Paradis. Je trouve très chouette la manière dont on travaille avec Frédéric Martin (metteur en scène), car nous partons sur une version différente de ce qui avait été intialement proposé avec Edmond Vullioud. J’avais envie d’amener une nouvelle sensibilité, qui aille plus loin que l’accusation et la plaidoirie directe. Je voulais amener de la douceur pour raconter le monde angélique. Le challenge était d’être moins carré et frontal qu’on procureur humain peut l’être et pouvoir toucher les membres du jury qui sont des anges. Nous essayons de mettre cet aspect en avant lorsqu’on évoque la relation qu’il a avec ses enfants ; ou lorsqu’il raconte qu’il a gâché son plus grand talent. Le challenge était de toucher le personnage en plein cœur, de le faire réfléchir via une émotion, via quelque chose de plus doux.

 

Pourquoi est-ce que les gens doivent venir voir « Bienvenue au Paradis » ?

 

 

Les spectateurs connaissent certainement l’auteur Bernard Werber. Mais surtout, les gens vont venir voir une comédie qui va les faire rire et les divertir! C’est important. Cette pièce va leur permettre de voyager ailleurs. Nous allons leur raconter une autre histoire vraiment différente de celle à laquelle ils peuvent être habitués. Le fond est très différent. Nous allons poser des questions essentielles que tout le monde se pose : « La vie, la mort, l’après-mort ou l’avant-vie ». Réfléchir à ça, ouvrir quelques portes, se poser quelques questions et se donner le droit d’en rire. Voilà, les spectateurs pourrons profiter d’un très beau décor, d’une très belle ambiance, d’un très bel univers et j’espère… de bons interprètes!

 

Qu’est-ce que tu penses du décor dessiné par Jean-Luc Taillefert et construit par l’équipe technique du TMR?

 

J’aime beaucoup, car c’est la première fois que j’ai l’impression que le décor transforme le lieu. Je vais souvent voir des comédies qui se jouent dans un huis clos classique fermé. Là il dépasse de la scène et vient vraiment dans la salle, il éclate un peu le lieu. Un plus, l’utilisation de la vidéo est aussi utilisée comme décor. Ce n’est pas trop narratif, ça sert la pièce. J’aime beaucoup les animations qu’a créées Yannick qui aide également à raconter la pièce.

 


Le spectacle a été interrompu en 2020 à cause du COVID et il revient enfin sur la scène du TMR. Quel est l’impact de ce hiatus sur le spectacle ?

 

Bien sûr que le regard des gens a changé. De toute façon, à chaque reprise de spectacle avec un laps de temps aussi important, le regard des artistes et du public change! C’est intéressant de voir qu’on peut comprendre le texte ou une réplique différemment, l’interprétation de certains passages change. L’expérience de la vie nous touche tous et ça me marque à chaque fois. Le spectacle change, la couleur donnée par les comédiens évolue. Finalement, le fait d’avoir traversé le COVID alors que le spectacle traite aussi de la maladie et de la mort, peut certainement toucher les gens.