Une couille pour s'enflammer

Une couille pour s’enflammer
Le TMR propose le patient amoureux , pièce de Vincent Bossel qui navigue entre boulevard, drame et humour absurde. 
– Critique par Boris Senff – 

Avancer l’argument d’un cancer des testicules pour une pièce qui se présente avant tout comme une comédie a quelque chose de casse-gueule. Le Lausannois Vincent Bossel, 27 ans, auteur et metteur en scène du Patient amoureux, pièce dont la première a eu lieu au Théâtre Montreux Riviera le 5 mars, relève le défi avec un panache certain.  

Descendre en piqué dans les tréfonds du caleçon ne l’empêche ni d’avoir du style, ni de garder le cap d’une légèreté réjouissante, malgré les blagues récurrentes sur le monorchide Adolf Hitler. Le jeune dramaturge impose un style d’humour que l’on pourrait qualifier de pirandellien – c’est le sentiment même qui rit une face opposée – et n’hésite pas à multiplier les rampes sur lesquelles il jette ses trois personnages, du théâtre de boulevard à celui de l’absurde en passant par les pistes discrètes du drame. 

Transpirant de vérité 

Le canevas du Patient amoureux part donc d’une couille tumorisée qui mène Léon (Baptiste Gilliéron) et sa femme Garance (Isabelle Caillat) chez une urologue, Alice (Marie Fontannaz). Le trio est excellent, chaque personnage transpirant sa vérité, avec, en surplus, les saillies métafictionnelles de la part de Léon, parfois très conscient de sa facticité. 

C’est d’ailleurs ce condiment réflexif qui justifie peut-être les incartades fréquentes hors du continuum de la vraisemblance : si nous sommes dans une fiction, tout est possible, toutes les ruptures sont envisageables… Cette façon de jouer sur et entre les dimensions donne de très bons résultats, notamment grâce à la crédibilité apportée par les acteurs. 

Mais cette ligne brisée est par définition fragile et peut parfois, au détour d’une répartie un peu faible, laisser entrevoir le néant que ne cache plus ce trio amoureux hautement improbable. Le rire, lui, demeure. 

24 heures | jeudi 7 mars 2024 – Boris Senff